Comparaison des côtes de popularité de Valéry Giscard d’Estaing et de François Mitterrand pendant la première année de leur septennat.
Ce vendredi 10 mai, Château-Chinon commémorait la victoire de François Mitterrand le 10 mai 1981 – comme chaque année depuis 1982. Il y a trente et un an François Mitterrand passait son premier anniversaire du 10 mai en assistant au concert de Catherine Ribeiro à Bobino tandis que les dirigeants socialistes fêtait les un an rue de Solférino autour d’un pot.
Même si le contexte de 1982 est différent de celui de 2013, ces mois de mai, séparés de 31 ans, marquent tous deux les un an de l’accession d’un président socialiste au pouvoir. Nous vous proposons de passer en revue la Presse de ces 10, 11 et 12 mai 1982 :
Le Monde du 12 mai revient sur les réactions politiques :
« Contrairement à MM. Jacques Chirac et Georges Marchais, qui, l’un par sa déclaration solennelle adressée au chef de l’Etat, l’autre par l’interview accordée à « l’Humanité », ont tenu à se manifester publiquement, les deux principaux acteurs de la journée « historique » du 10 mai 1981 ont célébré ce premier anniversaire dans une certaine discrétion. M. Mitterrand a passé sa soirée à Bobino (…). M. Giscard d’Estaing, lui, n’a pas quitté sa propriété d’Authon (…).
Cet anniversaire a donné lieu, en revanche, à diverses manifestations militantes. Le P.S a diffusé (..) un journal spécial de 4 pages dans lequel, sous le titre « Le 10 mai, l’espoir », M. Jospin, premier secrétaire invite les socialistes à « tenir bon » pour « préparer progressivement les conditions d’une victoire plus décisive encore sur le chômage, l’insécurité, l’injustice, l’égoïsme des puissants ». Les Jeunes Giscardiens, eux, ont entrepris une campagne d’affichage sur le thème : « La rose est fanée, le pouvoir usé, aujourd’hui, l’espoir, c’est Giscard. » (…).
Enfin, à l’Assemblée nationale, cet anniversaire a suscité plusieurs interventions. C’est M. Robert-André Vivien, qui, le premier, a invoqué un rappel au règlement pour souligner que le 10 mai est un « grand anniversaire ». Après un temps de silence, le député R.P.R (…) a précisé qu’il voulait parler…. De l’offensive du Garigliano lancée il y a trente huit ans par le maréchal Juin pendant la campagne d’Italie ! M. Jacques Toubon, député R.P.R a jugé « indécent », pour sa part, que le commentateur d’une radio nationale ait cité, le matin « dans le même paquet et au même niveau, l’homme du 18 juin et celui du 10 mai ». Au nom des socialistes, M. Roland Dumas a demandé une interruption de séance afin que chaque groupe puisse « fêter, à sa manière » l’anniversaire du 10 mai 1981. Il a obtenu satisfaction et le groupe socialiste s’est réuni « pour exprimer sa joie »… au grand agacement de M. Toubon qui estimait qu’en l’occurrence que le règlement n’était pas respecté. »
Le Figaro du 10 mai 1982, Max Clos :
« Au bout d’un an, l’échec du régime socialiste est flagrant. Ce qui en dépit des protestations de la majorité justifie pleinement le débat sur la légitimité (…). Personne ne peut ignorer que la question se pose nécessairement dès lors qu’entre le régime politique et son instrument, l’Etat d’une part et la volonté profonde de la nation d’autre part, il y a divorce. »
L’Humanité du 10 mai 1982, Georges Marchais :
« Le gouvernement et la majorité ont pris des mesures qui ont eu des effets positifs pour le monde du travail et le pays – je pense en particulier au relèvement du SMIC et aux prestations sociales qui ont été réévaluées. »
Lettre à l’AFP du 10 mai 1982, Jacques Chirac :
« C’est à François Mitterrand, chef de la majorité, mais aussi président de la République et donc garant des institutions, de veiller à ce que celles-ci soient respectées dans leur lettre et leur esprit par la majorité qui n’est pas propriétaire des institutions pas plus qu’elle ne l’est de la France et de son avenir. »
Le Matin du 10 mai 1982, Claude Weill
« Un an seulement. Pourtant, on à l’impression d’avoir toujours connu François Mitterrand, président de la république, tant l’homme s’est identifié à la fonction. (…) L’homme pourtant n’a pas changé. Pas changé… Il faudrait nuancer. Le vêtement est plus strict. Le verbe plus lisse : de son langage, qui (…) reste soigneusement ciselé, il a gommé bien des aspérités, troqué la verve polémique contre une ironie qui n’est pas moins redoutable (…). Mélange d’humanisme et d’égalitarisme, de méfiance et devant la civilisation moderne et de positivisme devant le progrès et la science.
On l’a comparé à un sphinx, aux empereurs de Chine, on l’a dit énigmatique, distant : d’une certaine façon, il l’est et l’a toujours été. Timide par nature, réservé par éducation, prudent par expérience (…). Il a de sa fonction une très haute idée. Etre « le premier d’entre les Français » est à ses yeux un redoutable honneur et impose la grandeur. (…) Mais il sait aussi être chaleureux, attentif attentionné souvent(…) Parlant du temps qui passe, des arbres, de tout et de rien, il est d’une humanité et d’une simplicité qui surprennent.
Mitterrand (a choisi) le chêne et l’olivier. Sa philosophie est celle des racines, du cycle des saisons, du temps. Il croit à l’histoire (…).
Il s’applique à mettre en œuvre son programme, à honorer son « contrat passé avec la majorité » (…). Auteur des « tables de la loi » (110 propositions pour la France), il en est le seul interprète. Lui seul décide du rythme et arbitre, lorsqu’un doute surgit (…). A l’égard du Parlement, il est plus indulgent : il a le respect des institutions et de prérogatives parlementaires (…).
« Vous verrez, le pouvoir est une prison » lui a dit Valéry Giscard d’Estaing, le 21 Mai 1981 (…). Après 12 mois François Mitterrand en sourit. Il prend le temps de vivre. Tout cela est pour lui essentiel : c’est ainsi, pense t’il, en gardant le contact avec les gens et les choses, qu’il réussira. »
Le Matin du 12 mai 1982, « Du changement à l’unité nationale » par Guy Claisse :
« L’Unité nationale, thèmes majeurs des derniers discours de François Mitterrand n’est pas une nouveauté dans la bouche du 1er président socialiste de la Ve République. Dès le jour de son installation (…) il affirme sa volonté d’être le président de tous les Français et invitait ceux-ci à se joindre à l’entreprise de redressement qu’il allait assigner à son gouvernement (…).
A quoi bon s’user à lancer des appels à l’unité nationale dans le même temps où l’on mettait en œuvre les nationalisations, où l’on abolissait la peine de mort, où l’on créait un impôt sur la fortune, où l’on engageait par la loi de décentralisation une réforme destinée à bouleverser en profondeur les processus de décision administrative rt à redistribuer le pouvoir politique au niveau des département ? Sans oublier le projet accordant de nouveaux droits aux travailleurs dasn les entreprises… Autant d’initiatives qui ne pouvaient pas manquer d’exaspérer les catégories sociales et les partis politiques pour lesquels le 10 mai ne signifiait pas seulement la perte du pouvoir d’Etat, mais aussi une atteinte à l’ordre économique et social dont ils se considéraient les dépositaires. L’essentiel de ce réformes étant réalisé ou sur le point de l’être, le temps est venu d’apaiser les esprits. Non que François Mitterrand et son gouvernement estime en avoir terminé avec le changement (…). Mais d’autres facteurs militent pour une cause psychologique : la résistance plus forte que prévu de diverses catégories socio-professionnelles et l’essoufflement de la reprise économique, les deux étant d’ailleurs complémentaires (…).