CONFERENCE DE PRESSE DE M. FRANÇOIS MITTERRAND
Mercredi 29 NOVEMBRE 1989
Mesdames et Messieurs, j’effectue actuellement ma dernière visite dans une capitale des douze pays de la Communauté. Ce périple m’a conduit partout, dans l’Europe des Douze et je l’achève ici à Athènes. J’avais songé à venir plus tôt, les circonstances ne s’y prêtaient pas, j’ai été donc très heureux de pouvoir saluer en ce 29 novembre le nouveau chef du gouvernement dont la réputation est grande ‑ que d’étudiants, en France connaissent son nom… ‑. Apprendre qu’il était devenu le Premier ministre de la Grèce représentait pour nous un signe, qui, sans entrer dans les problèmes intérieurs de l’Est qui ne sont pas de ma compétence, a une valeur pour l’Europe. J’ai pu également pendant ces quelques heures, faire la connaissance de diverses autres personnalités et notamment le ministre chargé des Affaires étrangères.
Les sujets traités sont des sujets bien connus des journalistes qui m’accompagnent. Le Sommet européen de Strasbourg, qui aura lieu les 8 et 9 décembre prochain, tourne autour de quelques questions centrales : l’Union économique et monétaire, la Charte sociale, la date de convocation de la Conférence intergouvernementale prévue à Madrid. d’autres problèmes, qui ne sont pas négligeables, dont certains sont déjà traités comme le problème de l’Europe de l’audiovisuel, et d’autres sont en voie de l’être comme l’agence de l’Environnement. Et enfin, cette dimension qu’il ne faut jamais oublier, le parachèvement du marché intérieur qui exige à tout moment que des décisions soient prises afin de ne pas être en retard sur le calendrier. Calendrier qui comporte, vous le savez, une première étape, qui devrait se terminer le 1er juillet 1990 et le commencement d’une seconde, dont j’attends que les principaux éléments de solution apparaissent avant la fin de 1990.
Indépendamment de ces questions‑là, dans chacun des pays où je me suis rendu en qualité de Président du Conseil européen, ont été abordés un certain nombre de problèmes qui intéressent particulièrement le pays hôte : quelles questions les dirigeants grecs se posent‑ils par rapport au devenir de l’Europe de la Communauté ? Selon le pays, la tonalité change, l’ordre des préoccupations varie, et j’ai pu observer avec grand intérêt qu’ici à Athènes, il n’y a aucun dissentiment concernant ce que nous pensons à Paris et ce qui a été entrepris depuis de nombreuses années. II n’y a pas de contentieux, il y a seulement quelques points à préciser. La Grèce se comporte en partenaire loyal et déterminé de l’Europe des Douze.
Nous en profitons généralement pour aborder quelques problèmes bilatéraux. Cette fois‑ci, je dois dire que c’est un voyage assez facile, car nous n’avons pas de contentieux entre la Grèce et la France. il n’y a pas tellement de pays dont on puisse dire cela. Depuis longtemps nos politiques étrangères se sont harmonisées, tout cela reposant sur une amitié entre peuples très ancienne et très forte.
Voilà pour ce qui est du programme convenu pour Strasbourg, vous imaginez bien que se sont ajoutées un certain nombre de considérations touchant aux évolutions actuelles en Europe de l’Est. Beaucoup de ces problèmes ont été traités lors du Conseil européen extraordinaire qui s’est tenu à Paris le 18 novembre mais c’est une situation qui évolue chaque jour. Cette situation que j’avais décrite, c’était facile à prévoir, comme contagieuse, a été effectivement contagieuse. La Tchécoslovaquie a rejoint ou est en train de rejoindre le lot des pays en mouvement. D’autre part, les problème touchant au sort de l’Allemagne, spécialement de l’Allemagne de l’Est, occupent beaucoup d’esprits, suscitent beaucoup de déclarations. Nous avons parlé et nous parlerons de tout cela, notre ordre du jour classique est imposé par les circonstances puisque l’Europe communautaire a vocation à parler des grands problèmes politiques qui occupent le monde. J’entrerai dans le détail si vous le voulez, ou plus profondément dans l’analyse pour répondre aux questions de votre choix. Mais je crois que Monsieur le Premier ministre Zolotas souhaite dire quelques mots avant cela…
QUESTION ‑ Monsieur le Président, je voudrais vous demander quelle est votre position en ce qui concerne les points de vues qui existent et qui ont été écrits, à savoir que la rencontre Bush‑Gorbatchev à Malte sera un nouveau Yalta, sans la participation de l’Europe ?
LE PRESIDENT ‑ Dans ce cas‑là, ce serait un vrai Yalta. C’est vrai qu’à l’époque, l’Europe était d’une certaine manière présente mais il s’agissait des chefs d’Etat qui se trouvaient à la tête des armées victorieuses. Beaucoup de temps a passé depuis et je pense que les conditions ne sont absolument pas remplies pour que l’on puisse dire cela. Non, il ne peut pas s’agir d’un nouveau Yalta. II s’agit des principaux dirigeants des deux principales puissances du monde, en ce sens c’est une rencontre importante, un événement sur la scène internationale. Mais les sujets à traiter sont eux‑mêmes d’une grande ampleur, sans cependant que l’on puisse penser que MM. Bush et Gorbatchev soient en mesure, et même aient l’intention, de peser sur je ne sais quel nouveau partage de l’Europe. Ils doivent bien avoir leur opinion, ils en ont le droit, mais ils ont beaucoup d’autres sujets à traiter qui sont de leur strict ressort : le désarmement, le règlement des conflits locaux ou régionaux sur la surface de la planète et, sans doute, en raison de la crise qui sévit caris l’Europe de l’Est, la façon la plus utile de contribuer à un redressement de cette situation économique. Voilà pourquoi je trouve tout à fait normal et même souhaitable que MM. Bush et Gorbatchev se rencontrent mais je ne m’attends pas du tout à ce qu’ils décident quoi que ce soit à notre place, à la place des Européens de l’Ouest.
QUESTION ‑ Quelle est la position de la Communauté vis-à‑vis de l’exigence du peuple allemand pour sa réunification ? Est‑ce que vous craignez cette éventualité d’une réunification des deux Allemagnes ?
LE PRESIDENT ‑ J’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer à ce sujet à diverses reprises et, en particulier, à Bonn, lors d’une conférence de presse en présence du Chancelier Kohl. Ce que j’ai dit à cette époque m’engageait suffisamment pour que je ne sois pas contraint d’y revenir constamment mais enfin c’est vrai que la situation bouge. II est normal que vous me posiez la question.
J’ai bien dit que le déroulement des événements qui occupent l’Allemagne de l’Est et l’Allemagne tout entière aujourd’hui, devait nécessairement être démocratique et pacifique.
Démocratique, cela suppose que, de part et d’autre, les peuples consultés dans le cadre de systèmes politiques, de régimes démocratiques, auraient à s’exprimer.
Pacifique, cela suppose aussi que le statut de l’Europe, tel qu’il découle des événements et des négociations d’il y a plus de quarante ans, quarante‑cinq ans, se fasse sur la base d’un consentement, de telle sorte que nous ne courrions pas le risque de voir revenir le climat d’une sorte de guerre froide. C’est pourquoi, lors de la réunion du 18 novembre à Paris, il avait été convenu que les partenaires des Douze n’aborderaient pas la question des frontières.
Donc, démocratique et pacifique.
On doit toujours tenir compte, en premier lieu, de la volonté des peuples, individus et collectivités. Leurs volontés libres, c’est une donnée nécessaire. Ce n’est pas une donnée suffisante dans la mesure où nous sommes tous garants d’un statut pacifique et d’un avenir qui doit l’être aussi pour l’Europe tout entière. Je comprends très bien et je ne m’effraie pas des aspirations exprimées par les personnalités allemandes ‑ j’ai toujours dit qu’elles étaient légitimes ‑ mais je les sais assez responsables et assez raisonnables pour aborder ce type de question, à la fois dans le temps et dans l’examen de toute une série de situations qui exigeront naturellement que les autres peuples de l’Europe ne se trouvent pas devant une situation acquise sans avoir pu, surtout pour ceux qui ont une qualité de garant de l’équilibre européen, avoir l’occasion de dire leur mot.
Donc tout cela se déroule au fond conformément aux prévisions. Mais nous ne sommes pas au terme. La démocratie a encore du chemin à parcourir, il me semble, et la paix c’est un bien aussi précieux que la liberté, étant bien entendu que la paix n’est acceptable que si elle protège la liberté.
Donc voilà, je vous dis mes réactions. J’ai lu, j’ai entendu, j’aurai l’occasion sûrement d’en parler dans quelques jours, d’abord le 4 décembre à Bruxelles dans une réunion de l’OTAN, réunion politique. et puis quelques jours plus tard, le 6 de ce même mois, à Kiev, au cours d’un entretien avec M. Gorbatchev, puis les 8 et 9 décembre à Strasbourg, pour le Conseil européen, avant de retrouver sans doute ce même type de problème lorsque je rencontrerai le Président Bush, en territoire français lointain, aux Antilles, le 16 décembre et enfin lorsque je me trouverai, le 20 et 21, en Allemagne de l’Est. Vous me permettrez d’aborder cette question ‑ ou plutôt de la reprendre ‑ après Bonn. Je suppose qu’il y aura un peu de répétition dans l’air avant la fin de ce mois.
QUESTION ‑ En 1989. l’évolution en Europe de l’Est a dépassé même les prévisions les plus osées. A quoi pouvons‑nous nous attendre pour 1990 ? A part les pays de l’Europe de l’Est, nous avons les pays de l’AELE qui se rapprochent de plus en plus de la Communauté, comme l’Autriche, qui a déjà fait une demande d’adhésion et Chypre et Malte également discutent de l’éventualité d’une adhésion, nous entendons dire également qu’une union paneuropéenne ne devrait pas se faire attendre pour longtemps. Que pouvons‑nous attendre pour l’année 1990 ?
LE PRESIDENT ‑ Vous avez aussi la demande de la Turquie que vous avez oubliée. Le Roi du Maroc a même suggéré l’adhésion de son pays à la Communauté économique européenne. Et déjà on commence à parler de quelques pays de l’Est qui pourraient s’y joindre. Vous me prenez pour un devin : qu’est‑ce qui va se passer en 1990 ? Vous auriez dû me poser la question au début des années 1989, on aurait pu voir si j’avais des dons de voyance. En réalité, vous savez, quand la liberté commence à s’engouffrer par une brèche, cela devient si formidable qu’il n’est guère de murs ‑ pour reprendre une expression bien connue ‑ qui puissent y résister… C’est ce qui se produit, simplement cela se produit avec une force qu’au fond on ne soupçonnait pas. Cela a été possible aussi grâce aux initiatives prises par M. Gorbatchev, à une sorte d’état d’esprit et d’ouverture, au refus de l’emploi de la force. J’avais dit, il y a quelques semaines ‑ « la contagion va continuer, elle va continuer en Europe ”.
Maintenant, vous me parlez des autres pays, des autres régions. II y a déjà des demandes d’adhésion qui sont faites. Jusqu’ici moi j’ai adopté une position qui mérite d’être discutée, tendant à penser que la Communauté des Douze avait assez de problèmes internes à régler d’ici 1992, 93 ou 94, pour qu’elle n’alourdisse pas sa charge par des adhésions prématurées. Telle est ma position. En revanche, je suis tout à fait favorable à des traités ou à des contrats de la Communauté avec les pays qui le souhaiteront. II en existe déjà : avec le Maroc, avec la Tunisie, avec Israël, avec la Hongrie… II peut, je dirais même il doit y en avoir d’autres. Je souhaite que nous traitions avec la Pologne, davantage encore avec la Hongrie, pourquoi pas avec l’Allemagne de l’Est et lorsque la démocratie s’exercera pleinement, pourquoi pas avec l’Union soviétique ? Mais pas sous forme d’adhésion.
Ce qui est vrai c’est que cette Communauté exerce un très grand pouvoir d’attraction, ce qui commande son devoir. Peut‑être n’en a‑t‑elle pas elle‑même suffisamment conscience. Parce qu’on espère en elle dans l’Europe tout entière, elle a l’obligation de réussir, ce qui devra peser sur le sentiment des responsables lorsqu’ils se retrouveront les 8 et 9 décembre à Strasbourg.
Quant aux pays de l’AELE, je suis le premier Président en exercice du Conseil européen qui ait pris un contact officiel avec eux. Je me suis rendu à Reykjavik, parce que l’Islande occupe présentement la présidence des pays de l’AELE. Je souhaite qu’il y ait des accords. La discussion a commencé, M. Jacques Delors la suit.
On ne peut pas parler que d’exception. Déjà les pays de l’AELE ne souhaitent pas débattre du Marché commun agricole. C’est déjà une tranche très importante de ce qui fait l’Europe actuelle. Et puis plusieurs d’entre eux souhaitent bénéficier d’exception : l’Autriche pour les transports, l’Islande pour la pêche, la Suisse pour les services financiers. On ne peut pas faire une addition à force de soustractions, mais enfin, la bonne volonté aidant, et avec le désir légitime de s’entendre, j’espère que l’on arrivera à un accord.
Chypre et Malte, je n’avais pas connaissance de leur demande d’adhésion, mais pourquoi pas ? Ce sont des pays européens intéressants et qui devraient être tout à fait souverains. Mais, la réflexion que je faisais à propos des demandes déjà faites s’appliquerait à leur cas.
QUESTION ‑ Monsieur le Président de la République, je voudrais si vous me permettez, rester encore sur l’Allemagne. Etant donné que les relations franco‑allemandes sont très positives surtout grâce à vous et que le 20 décembre vous serez en Allemagne de l’Est, je voudrais vous demander quelle est votre position sur le fait que le Chancelier Kohl, hier, a posé à longue échéance un plan qui prévoit la possibilité d’une confédération de deux Etats allemands et M. Krenz le chef de l’Allemagne orientale, il y a quelques jours a dit à peu près la même chose au « Financial Times », il n’a pas exclu une confédération. La question : au point de vue même juridique, pouvez‑vous penser à la possibilité d’une confédération et que l’Allemagne orientale, dans ce cas, pourra être un membre associé à la CEE ?
LE PRESIDENT ‑ D’une certaine manière, il l’est déjà un peu, d’une manière indirecte. Ceci est une réflexion en passant qui ne doit pas être retenue par vous.
Une confédération, moi je ne veux pas entrer pour l’instant dans le détail des propositions qui ont été exprimées, qui méritent réflexion, du Chancelier Kohl qui a décidé tout un schéma sur l’avenir. Si ces deux Etats décident démocratiquement d’établir entre eux une confédération pour traiter en commun un certain nombre de sujets, je ne vois pas ce qui pourrait l’interdire.
Nous avons nous‑mêmes, d’ailleurs, avec l’Allemagne de l’Ouest un certain nombre d’accords spécifiques. Non, cet aspect des choses ne me choque aucunement.
QUESTION ‑ Monsieur le Président, vous avez trouvé que le Gouvernement grec était d’accord pour l’union monétaire de l’Europe et la charte européenne. Pouvez‑vous me dire quelle est la situation dans les autres capitales européennes que vous avez visitées en vue du Conseil européen de Strasbourg ?
LE PRESIDENT ‑ Je crois Madame, que les positions de chacun sont connues. La Grande‑Bretagne fait des objections de principe à l’idée d’une charte sociale. Je ne veux pas dire qu’elle soit anti-loi sociale, mais elle fait une réserve de principe sur l’idée d’une charte sociale qui s’imposerait donc aux douze pays. Et il y a des objections, peut‑être moins de principe que de pratique, mais pour cela il faudra s’adresser à Mme Thatcher, à l’égard de l’Union économique et monétaire. Quand je dis “ça me paraît moins de principe”, c’est que par exemple la Grande‑Bretagne a fait un contre‑projet par rapport à celui du Président de la Commission. Ce qui prouve qu’elle accepte d’entrer dans le système, en tout cas dans la discussion. On verra bien. Ce qui est vrai, c’est que la Grande‑Bretagne marque une différence sensible sur ces deux points par rapport à une grande majorité sinon à l’unanimité des autres partenaires.
II y a l’Allemagne fédérale, qui elle souhaite absolument, elle l’a souvent proclamé, une marche active de la Communauté vers l’Union économique et monétaire et vers la charte sociale. Elle s’interroge seulement sur la date d’ouverture de la Conférence internationale intergouvernementale qui serait habilitée à mettre au point l’Union économique et monétaire. II faut donc décider du moment où cette conférence aura lieu. Elle ne peut avoir lieu avant le 1er juillet 1990. Cela est le résultat de la Conférence de Madrid et cela résulte aussi de la nécessité d’achever la première étape, notamment le ter juillet 1990 avec la libération des changes et puis certaines avancées dans le domaine du marché intérieur. Après quoi, on atteindra la seconde étape.
De toute manière, on sait bien qu’il faudra avoir avancé avant 1992, enfin avant le 31 décembre 1992, et en tout cas avoir conclu avant les élections européennes. Cela vous donne un laps de temps entre 1992 et 1994.
Moi, j’estime qu’il convient de fixer cette date dès maintenant, la fixer pour l’année 1990 à la convenance naturellement du pays invitant qui sera à ce moment‑là, l’Italie. Je pense poser la question, en ces termes à Strasbourg, dans quelques jours. II faudra que chacun se détermine.
QUESTION ‑ Jusqu’à présent, il y a certains esprits en Europe qui pensent qu’à mesure que l’idée de confédération allemande avance (inaudible)… autrement dit il y aurait contradiction entre la construction d’une véritable Europe et l’idée qu’une véritable Allemagne européenne puisse apporter son travail.
LE PRESIDENT ‑ Moi je ne le pense pas. Mon théorème se pose plutôt en d’autres termes.
Plus il y aura d’attraction de la Communauté ou des pays de la Communauté, collectivement ou individuellement, sur les pays de l’Est, plus il faudra hâter la construction européenne. C’est cette construction européenne qui servira de môle à la construction future, dans une Europe profondément transformée. Donc, plus cette exigence se fait sentir, plus cela doit entraîner les membres de la Communauté européenne à s’engager dans des structures qui devront la conduire à l’Union européenne, telle qu’elle a été définie lors du Sommet de Stuttgart il y a quelques années :l’Union européenne qui comporte une union politique. Donc ma conclusion est contraire aux craintes qu’évoquait votre question. Vous me direz : cela pourrait nous embarrasser. Oui, cela peut embarrasser ceux qui, au sein de la Communauté, n’étant pas franchement acquis à l’Union européenne, chercheraient des prétextes.
Mais, comme je l’ai répondu tout à l’heure aux journalistes qui m’interrogeaient, la variété des accords que peut passer la Communauté avec les pays extérieurs est très grande : AELE, pays d’Afrique du Nord, pays de l’Europe de l’Est, Allemagne de l’Est, les accords de Lomé concernant plus de soixante‑dix pays d’Afrique, du Pacifique et des Caraïbes. Pourquoi le statut futur de l’Allemagne de l’Est ‑ ceci pour répondre à votre question ‑ n’existerait‑il pas dans cette configuration, selon des formes à déterminer sur lesquelles, naturellement, je ne peux rien vous dire, faute d’avoir engagé cette discussion avec mes partenaires.
QUESTION ‑ Monsieur le Président, au cours de cette courte visite à Athènes, est‑ce que vous n’avez pas eu le temps ou l’intérêt pour rencontrer les chefs des partis qui soutiennent ce gouvernement en ce moment en Grèce ?
LE PRESIDENT ‑ C’est‑à‑dire tout le monde ?
QUESTION ‑ Tous les chefs de parti.
LE PRESIDENT ‑ Ce n’était pas fait pour cela. Je ne remplis pas, pour l’instant, une visite en tant que Président de la République française, à ce pays ami qui s’appelle la Grèce. Je viens ici en qualité de président du Conseil européen, et j’ai limité le sujet de nos discussions aux questions qui traitent de l’Europe. Mais je serais par ailleurs très content de rencontrer ces personnalités. Je connais la plupart d’entre elles. J’espère que l’on créera une autre occasion.
QUESTION ‑ Monsieur le Président, est‑ce que la Communauté est satisfaite des déclarations faites par la Turquie au sujet des droits de l’homme et comment voyez‑vous les rapports d’Amnistie internationale sur la violation des droits de l’homme ?
LE PRESIDENT ‑ La déclaration est excellente et l’action c’est encore mieux, j’espère que tout cela ira très bien au demeurant. La Turquie fait partie du Conseil de l’Europe et elle aura l’occasion de s’exprimer dans le cadre parlementaire européen, je n’ai pas à me substituer au jugement de tous les autres.
QUESTION ‑ Monsieur le Président, comme le Premier ministre vient de nous le dire, la discussion que vous avez eue avec le ministre des Affaires étrangères. M. Samaras, l’inflation en Grèce est au niveau de 16‑17 % en comparaison avec les autres membres de la Communauté où vous avez été. Comment pouvons‑nous arriver à cette Union économique et monétaire européenne ?
LE PRESIDENT ‑ D’abord une situation intérieure cela se change. J’ai hérité d’une inflation en France qui était à peu près de 14 % en 1981, elle est retombée à 2,5 %, elle est aujourd’hui un peu au‑dessus de 3 %. Cela se change par la politique que l’on pratique dans un pays. Ensuite, le rapport de M. Jacques Delors, comme président de la Commission, a prévu cette situation. Naturellement, il a prévu toute une série d’étapes transitoires et de mesures particulières pour parvenir au résultat et les dirigeants de la Grèce, notamment M. le Premier ministre, souhaitent vivement cette union économique et monétaire tout en garantissant les intérêts de la Grèce.
QUESTION ‑ Je voulais dire qu’un des problèmes régionaux c’est le problème de Chypre et je voudrais demander au Président, comment faites‑vous face à ce problème grave ? Que fait la présidence française et quelles sont vos propositions pour la solution de ce problème ?
LE PRESIDENT‑ Mais Monsieur, la France s’est exprimée vingt fois sur ce sujet. Vous ne pouvez pas l’ignorer. La France estime qu’il devrait y avoir l’unité de Chypre et que ce pays devrait exercer entièrement sa souveraineté sur l’ensemble de son territoire. Elle se range derrière les propositions qui ont été émises aux Nations unies et elle souhaite que les deux parties de la population et leurs dirigeants aient la sagesse de comprendre que là est l’intérêt et le devoir. Je crois que ma proposition est très proche de celle qu’expriment les dirigeants de ce pays. Je n’ai rien à ajouter à cela.
QUESTION ‑ Je vais parler encore une fois de la question de Chypre parce qu’un pays qui est membre du Conseil de l’Europe, c’est‑à‑dire la Turquie, occupe en ce moment un pays indépendant qui est lié à l’Europe et à la CEE. Que pensez‑vous de cette question d’occupation d’un pays étranger ?
LE PRESIDENT ‑ Mais je viens déjà de vous le dire. II est vrai que ce n’était pas vous qui posiez la question et je comprends très bien que ce qui appartient à l’un n’appartient pas à l’autre. Je vous répète que la France a pris des positions publiques conformes au droit international : Chypre est un pays souverain et indépendant. II doit tenter de résoudre ses problèmes intérieurs en réalisant une certaine unité à l’intérieur de son pays, en rendant justice, en étant équitable à l’égard des différentes populations qui vivent sur son sol. Sur le plan international, nous avons toujours adopté une attitude conforme à ce principe et constamment, dans ma fonction actuelle de Président du Conseil européen, j’ai rappelé ce principe. Je ne vois vraiment pas ce que je peux ajouter sinon que je voudrais inviter les pays en cause à montrer plus de sagesse pour que l’on parvienne à rendre à ce peuple chypriote son droit.