L’amnésie semble être un des traits caractéristiques de notre époque. C’est ainsi que la droite, en reprenant en mains l’essentiel des pouvoirs, tente aujourd’hui, avec la décentralisation, de faire sien un héritage qui ne lui appartient pas.
Aujourd’hui, qui, parmi les plus libéraux, oserait se dire opposé au mouvement décentralisateur, au juste exercice de la démocratie locale par les citoyens et leurs représentants locaux ? Qui, dans le camp conservateur, oserait montrer du doigt l’essor de l’intercommunalité ou ne pas revendiquer le développement durable, désormais décliné à tous les temps ? Et pourtant, si chacun, dans son canton, sa commune, sa région, perçoit les effets de la décentralisation, il n’en allait pas de même en 1982 ! Quand François Mitterrand et Gaston Defferre ont lancé le chantier des lois de décentralisation, mettant fin à l’omniprésence de l’Etat, restituant aux citoyens les clés de leur propre devenir, donnant à nos collectivités locales une authentique autonomie financière, les rangs de la droite annonçaient un cataclysme ! Le naufrage annoncé n’a pas eu lieu, bien au contraire. Près de vingt-cinq ans plus tard, l’ultime perversion de la droite est de faire croire aux Français qu’elle a participé à l’avènement de ces grandes lois et qu’elle s’apprête à leur donner un nouveau souffle ! Le coup de peinture annoncé risque d’effacer la substance même, l’esprit de la décentralisation voulue par François Mitterrand comme un levier de l’essor démocratique local. En transférant des charges nouvelles sans les financements pour les assumer, en expérimentant toutes les techniques pour débarrasser l’Etat des charges qu’il n’entend plus assumer, c’est la décentralisation qui s’en trouve illisible et travestie.
La décentralisation modèle Raffarin est un piège pour les contribuables en même temps que pour les élus locaux.