Au moment où prenait fin la guerre froide, tout un chacun espérait que le « nouvel ordre mondial » qui s’instaurait autoriserait enfin une diplomatie apaisée. Il n’était pas vain d’en espérer davantage de justice pour les peuples et des échanges plus aisés entre les Etats. Or force est de constater qu’il n’en a rien été et que le droit international a été mis à mal en de nombreuses circonstances, qu’il n’a pas été l’outil décisif dont quelques uns avaient rêvé. C’est pourquoi il nous a semblé intéressant d’examiner la conception et la pratique de François Mitterrand en la matière, examen d’autant plus intéressant que sa réélection, en 1988, fait qu’il a eu à exercer ses deux mandats dans les deux contextes.
Il a d’abord eu à conduire la politique extérieure française dans un monde où l’URSS, même si elle s’affaiblissait sensiblement, demeurait une grande puissance dont les menaces et les initiatives se devaient d’être prises avec la plus grande considération. Puis, au cours des trois dernières années de son deuxième septennat, il lui a fallu agir et réagir dans un paysage profondément bouleversé. La guerre froide était finie et les points de repères qui avaient prévalu pendant près de quarante années s’effaçaient jour après jour. Beaucoup devait être réévalué et réinventé.
Voilà ce qui nous a conduit à vous proposer une analyse qui permet de distinguer ce qui, d’un côté, était commandé par la nécessité d’une géopolitique plus mouvante que jamais et, de l’autre, a été l’empreinte originale et personnelle de François Mitterrand, l’interprétation qu’il en a donnée, la manière dont il a orienté et signé l’action internationale de la France, dont il lui a ouvert de nouveaux horizons.
Par ailleurs, nous commençons à aborder dans ce numéro de « La Lettre » un sujet qui nous semble avoir été insuffisamment traité jusqu’à présent : quelle politique sociale François Mitterrand a-t-il voulue au cours de son deuxième septennat? Comment s’y est-il impliqué? Avec quels résultats? Ce premier article n’est que l’amorce d’un dossier que nous enrichirons du témoignage de quelques uns des principaux acteurs alors en présence, en veillant à mettre en rapport ces témoignages avec une analyse aussi précise que possible de ce qui faisait alors le contexte économique et social de la France.
Enfin, nous avons eu le plaisir de recueillir les souvenirs de l’architecte Jean-Michel Wilmotte qui, à deux reprises, a eu l’occasion de travailler pour François Mitterrand. Tout d’abord pour la transformation des appartements de l’Elysée. En cette circonstance, il nous donne à voir un peu de l’homme privé. Puis, un peu plus tard, pour l’aménagement du Grand Louvre, qui le met en présence de l’homme d’Etat en action. Une autre façon d’élargir l’horizon français.