Le débat intervenu à l’occasion de la commémoration de la rafle du vélodrome d’hiver, dimanche 22 juillet 2012, donne l’occasion à l’Institut de rappeler les faits suivants.
Le 16 juillet 1992, François Mitterrand, Président de la République, rend hommage aux victimes de la rafle du Vel d’Hiv’ en déposant une gerbe au pied de la stèle commémorative. Le Président est accompagné de Madame Rozette Bryski, rescapée de cette terrible journée.
1/ C’est à l’initiative de François Mitterrand, Président de la République, que cette journée de commémoration annuelle a été instaurée. François Mitterrand en avait fait l’annonce en 1992 ; laquelle sera suivie d’un décret officiel en date du 3 février 1993 instituant une cérémonie annuelle nationale et départementale, à Paris, à Izieu et dans chaque département.
2/ François Mitterrand n’a jamais minimisé le drame du Vel d’Hiv, au contraire. À plusieurs reprises, en tant que Président de la République, il a rappelé à la Nation la nécessité de conserver la mémoire de ce douloureux événement.
Par exemple, à l’automne 1992, interviewé par la télévision israélienne, il qualifiait lui-même le drame du Vel d’Hiv de « drame qui ne peut pas être oublié », dont le souvenir devait « être sauvegardé et honoré ». Il ajoutait que cette rafle était « intolérable », « insupportable pour l’esprit », « donc [un acte] essentiellement condamnable ».
3/ François Mitterrand n’a jamais minimisé la responsabilité du régime de Vichy dans le déroulement de ces événements, au contraire. C’est la raison pour laquelle, dans le décret publié en février 1993 instituant la commémoration nationale, il est justement question « des persécutions racistes et antisémites commises sous l’autorité de fait dite “gouvernement de l’Etat français” », reprenant ainsi la formule de l’ordonnance du 9 août 1944 du général de Gaulle rétablissant la légalité républicaine.
Télécharger ici le décret n°93-150 du 3 février 1993
4/ Ce sont ces considérations qui conduisirent François Mitterrand, en tant que Président, à décréter que la République – ceci est explicitement stipulé dans le décret de 1993 – devait aussi honorer toutes les victimes de ces persécutions – déportés politiques et syndicaux, résistants et patriotes, francs-maçons, africains, tziganes, républicains allemands, italiens ou espagnols, homosexuels, etc.
Dans ce but, il choisit la commémoration du Vel d’Hiv, date la plus symbolique pour ceux qui en ont été massivement les premières victimes, les personnes de confession juive, objet d’un génocide incomparable. D’où la date nationale retenue pour cette commémoration — le 16 juillet 1942, début de la rafle –, d’où la commémoration particulière du drame des enfants de la Maison d’Izieu.
5/ François Mitterrand refusait, en tant que Président et donc au nom de la vérité historique et de la République, de reconnaître la responsabilité de celle-ci dans l’exécution des actes antisémites du gouvernement de Vichy ; régime issu du renversement de la République à partir du 11 juillet 1940, date de la création de l’État français.
Le 14 juillet 1992, aux journalistes qui l’interrogeaient sur la responsabilité de « l’État français » dans ces crimes, il rappelait qu’à cette date l’État français « c’était le régime de Vichy, ce n’était pas la République ». Il considérait donc que c’est à Vichy que l’on devait « demander des comptes » mais qu’à l’inverse « la Résistance puis le Gouvernement de de Gaulle, ensuite la IVe République » avaient été « fondés sur le refus de cet État Français ». Aussi, il n’admettait pas « une reconnaissance juridique d’une responsabilité de la République française » (extrait de son interview au journal Yedioth Aharonoth, en 20 novembre 1992).
6/ Ce faisant, François Mitterrand se conformait à l’esprit de l’ordonnance du 9 août 1944, prise par le général de Gaulle, précisant dans son article 1 que « la forme du gouvernement de la France est et demeure la République » et qu’« en droit, celle-ci n’a pas cessé d’exister ». La même ordonnance frappait de nullité l’ensemble des « actes de l’autorité de fait, se disant “gouvernement de l’Etat français” ».
7/ À la suite du décret de 1993, un comité de personnalités représentatives, a été réuni afin de rédiger le texte qui devait figurer sur le monument édifié à l’emplacement des commémorations. Ce texte est le suivant : « la République française, en hommage aux victimes des persécutions racistes et antisémites et des crimes contre l’humanité commis avec la complicité du gouvernement de Vichy, dit “gouvernement de l’État français”. N’oublions jamais ».